Surprenante parution en page 9 du journal Le Monde daté du samedi 1er août : la déclaration rosicrucienne des devoirs de l’homme dans un communiqué de l’AMORC (Ancien et Mystique Ordre de la Rose-Croix). Sur une pleine page, un prologue, 14 articles et un épilogue sur la nécessité de prôner un « Etat de devoirs » pour tous dans un Etat de droits.
Aussi bien pensant et intentionné soit le contenu du texte, il est intéressant de s’interroger sur les raisons de cette prise de position publique, 6 jours après la diffusion d’une enquête très fouillée sur Canal+ sur la Franc-Maçonnerie et 6 jours après la parution de cette même déclaration pleine page dans le JDD et dans le Figaro quelques jours avant. Il ne faut certainement pas tomber dans le piège de croire qu’il s’agit de la part de la presse d’un de ses marronniers les plus célèbres et juteux.
La période que nous vivons est en effet extrêmement propice à toutes les formes d’ésotérisme et les deux principaux discours tenus par le président de la République sur la laïcité positive et la place des religions dans notre société (où il fait une mention directe à la Franc-Maçonnerie) sont venus en quelque sorte légitimer et encourager les ordres dits des « forces occultes » dont par ailleurs le recrutement n’a cessé d’augmenter ces dernières années.
Il convient de rappeler que la Rose-Croix est une spiritualité ésotérique d’essence empirique très en vogue de nos jours, issue d’une tradition parallèle à celle de l’Eglise. Elle est très fréquemment et injustement confondue avec la Franc-Maçonnerie (majoritairement d’essence symbolique) et se distingue très fortement du Christianisme, pour ne pas dire s’y oppose. Réhabilité depuis janvier 2008 par une circulaire du Ministère de l’Intérieur, l’AMORC ne figure plus sur la liste des sectes de la commission parlementaire (alors qu’il y était inscrit en 1999) et n’est pas non plus cité dans le dernier rapport de la mission Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires).
Il n’en reste pas moins que cette prise de tribune publique dans les grands quotidiens nationaux est dérangeante et interroge les fondements du pluralisme de l’information.
Il appartient au journal Le Monde de s’expliquer sur cette publication afin d’éclairer l’ensemble de ses lecteurs. Il en va de soit aussi pour le JDD et le Figaro mais pour le moment aucune justification n’a été fournie par les trois rédactions.
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