Culture et politique, où est le problème ? C’est la question qui était posée à la maison des Métallos de Paris le lundi 11 octobre. Pour y répondre, une poignée de spécialistes du débat culturel et … une élue, elle-même issue du secteur culturel, seule représentante de sa catégorie. Cherchait-on vraiment une réponse à la question posée ? Il suffisait d’examiner la composition de la salle pour l’obtenir et déplorer, une fois de plus, la tendance des débats sur la culture à tourner à l’entre – soi.
Culture et politique où est le problème ? Cette question à laquelle il valait mieux ne pas répondre, autre caractéristique du débat culturel, était posée à partir d’un ouvrage intitulé « La bataille de l’imaginaire ». Au vu des débats, il paraissait évident que cette bataille était gagnée : l’imaginaire culturel s’est tellement émancipé de la réalité politique que la fiction de politique culturelle qui en résulte ne résiste plus, et depuis longtemps, à l’épreuve du réel.
Soucieux de ne pas froisser le milieu culturel, le monde politique a préféré lui cacher cette terrible vérité. D’exception culturelle à la française en bataille contre la « directive services », il l’a progressivement mis sous cloche, isolé du pays réel à la manière d’une réserve d’indiens. Et maintenant que la bulle menace d’exploser, l’homme politique évite prudemment les éclaboussures, raison pour laquelle il préfère se tenir à l’écart des débats sur la culture.
A quoi assiste t-on au juste ? Tout simplement à la fin d’un cycle, long de plus de plusieurs siècles, qui vit le mécénat royal évoluer lentement vers un système d’aide publique aux arts et aux artistes. Et c’est ce système plutôt astucieux que l’on nomme abusivement « politique culturelle », alors qu’il n’a rien de politique et pas grand-chose de culturel. Pourquoi ce système ne tient-il plus debout ? Parce qu’après des années de croissance les moyens publics se sont mis à stagner mais aussi, et même surtout, parce que l’objectif de démocratisation qui lui servait de justification est dépassé.
Il ne s’agit plus d’apporter « de la culture » (et encore moins LA culture) à ceux qui en seraient dépourvus. A l’ère de la mondialisation des échanges et de la généralisation d’Internet, le nouvel horizon de la politique culturelle ce devrait être celui du dialogue des cultures ; son nouvel impératif celui de la préservation de la diversité ; son nouveau chemin celui qui mène de la pluralité des formes et des contenus à l’unité de l’être humain. Alors oui, pour construire ce futur, il faudra bien des débats entre acteurs de la culture et élus politiques, il faudra surtout un peu plus de discernement et de courage et de part et d’autre.
Denis Declerck*
Du même auteur :
*Denis Declerck est directeur de l’action culturelle à la communauté d’agglomération d’Evry Centre Essonne. Avant cela, il a été directeur de théâtres à Vienne (1989-1992) puis à Béziers (1992 – 1999) avant de rejoindre le ministère de la culture : conseiller théâtre et action culturelle à la DRAC Nord Pas de Calais (1999 – 2004) puis inspecteur (2004 – 2009). Il a notamment été le coordonnateur et le rapporteur général des Entretiens de Valois. Denis Declerck est titulaire du Master 2 “Direction de projets culturels” délivré par l’Observatoire des Politiques Culturelles et Sciences – Po Grenoble (1997).
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