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Culture, Front national et droits culturels

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Jean-Michel Lucas* nous offre une fois de plus une contribution majeure. Une réflexion sur la culture, les droits culturels et la politique culturelle qui passe au révélateur ce qui se trame dans le programme culturel du Front National.

  • à toutes celles et ceux qui auraient été tenté(e)s de croire, ne serait-ce qu’un instant, en la duperie profonde et dangereuse que constitue le Front National pour la démocratie et pour notre république, il est encore temps de retrouver la raison ;
  • à toutes celles et ceux qui combattent cette colonisation des esprits entreprise par le Front National depuis trop longtemps, il n’est pas trop tard ;
  • à toutes celles et ceux qui croient encore que la culture est le rempart ultime de ce qui fait humanité et civilisation contre l’ignorance, la barbarie et la terreur, il ne faut ni se résigner ni se réfugier dans le confort des certitudes et des petits salons ;

ce texte vient s’ajouter à la longue liste des raisons pour lesquelles il n’y a aucune excuse pour dire qu’« on ne savait pas ».

En voici l’introduction :

« La loi NOTRe (Juillet 2015) a rappelé que la politique culturelle devait faire référence aux droits culturels des personnes ( article 103).

Pourtant, on m’a rapporté qu’à plusieurs reprises des acteurs professionnels des arts avaient marqué leur opposition franche à cette perspective, sous prétexte que les droits culturels feraient le jeu du Front National.

Cet argument m’a troublé, d’autant que je ne l’ai jamais entendu lors des interventions publiques que je fais pour promouvoir les droits culturels.

De plus, nul ne l’a, pour l’instant, revendiqué par écrit. J’ai pris au départ cet argument pour une basse manœuvre de dénigrement, sans grand intérêt.

Mais il est arrivé que le Front National recueille les voix de près de 7 millions d’électeurs. Le FN occupe des positions fortes dans plusieurs régions et communes. Il fallait donc prendre au sérieux cette question de la relation possible entre le Front National et les droits culturels. »

Pour lire la suite, cliquez ici.

*Président de Trempolino, docteur d’Etat ès sciences économiques et maître de conférences à l’université Rennes 2 Haute-Bretagne dont il fut le vice-président de 1982 à 1986, Jean-Michel Lucas fut également conseiller technique au cabinet du ministre de la Culture Jack Lang de 1990 à 1992, où il y impulsa notamment le programme « Cafés Musiques ». Nommé Directeur régional des affaires culturelles d’Aquitaine en 1992, il mit en place une politique culturelle d’État en étroit partenariat avec les collectivités locales, et avec comme préoccupation de valoriser la place de la culture dans les politiques de la ville et des territoires ruraux. Ce « militant de l’action culturelle », connu sous le pseudonyme de Doc Kasimir Bisou, a participé à plusieurs projets sur le devenir des politiques culturelles et sur les légitimités dans lesquelles elles s’inscrivent. En Bretagne comme en Aquitaine, il fut par ailleurs à l’origine de nombreuses réalisations concernant les musiques amplifiées (RAMA, festival d’Uzeste, Rencontres Trans Musicales de Rennes…).

Du même auteur sur cultural-engineering.com :

Vous pouvez retrouver toutes ses contributions en cliquant ici et n’hésitez pas à réagir et à contribuer au débat !

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Le CNM préfigure le CNSP ?

Le Centre National de la Musique est né fin janvier, c’est désormais officiel, et on ne peut pas dire que cela ait vraiment fait débat, comme si le consensus était unanime ou presque. Voici donc venu le guichet unique que tout le monde attendait, regroupant la quasi totalité des institutions musicales françaises. Quarante et un signataires (labels, éditeurs et producteurs de spectacles) qui ont négocié fermement son périmètre pour s’assurer de recevoir autant qu’il donne dans ce grand pot commun calqué sur le modèle du CNC. Même les petits labels se sont réjouis d’être enfin pris en compte ! Pourtant des tensions s’expriment déjà vertement entre les producteurs de disques (SNEP) et ceux de concerts (PRODISS) mais aussi dans le domaine du spectacle vivant dont les représentants se montrent particulièrement mécontents et inquiets.

Peu concerné par cet accord, le spectacle vivant exprime ses craintes de voir la démarche du CNM préfigurer le démantèlement du ministère de la Culture et de la Communication et par voie de conséquence une dérégulation du secteur. Le SYNDEAC (qui représente les scènes nationales de danse et de théâtre) voit ainsi poindre l’arrivée des agences sur le modèle pratiqué en Grande-Bretagne, alors que le spectacle vivant (mais aussi au fond le ministère) a besoin d’une réforme profonde de son organisation pour espérer poursuivre ses missions. Un centre national du spectacle vivant et des scènes labelisées verra-t-il le jour ? A l’heure où les arguments électoraux s’aiguisent, quel chemin prendre ? Quel projet de société par, pour et avec le secteur culturel ?

En tirant une nouvelle fois la sonnette d’alarme, le SYNDEAC pourrait bien se trouver malgré lui pris dans un mouvement de réformes structurelles du secteur face auxquelles il faudra être en mesure de proposer une alternative cette fois-ci crédible. Fini le temps de la reproblématisation qui fait ronronner tout le monde ou presque depuis deux décennies. On dit souvent que c’est dans les les situations de crise que nous sommes les plus créatifs (pour le meilleur comme pour le pire d’ailleurs), et bien nous sommes désormais quasiment au pied du mur. A chacun de prendre ses responsabilités pour moderniser et pérenniser notre politique culturelle et ses secteurs.

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L’économie mauve, une nouvelle alliance entre culture et économie

Dans notre souci d’apporter des contributions et des regards nouveaux sur l’avenir de la culture et les politiques culturelles dans notre société, et dans le cas où vous auriez manqué sa diffusion sur lemonde.fr il y a quelques semaines, nous souhaitons (re)porter à votre attention le manifeste pour l’économie mauve. Ce texte propose une approche qui milite clairement pour faire de la culture le quatrième pilier du développement durable. Mais contrairement à de nombreux textes issus du secteur culturel, cette initiative propose un angle de vue totalement neuf à travers la notion d’empreinte culturelle. A méditer et sans aucun doute à débattre !

En ce début de XXIe siècle, le monde bouge, plus vite et plus fort que prévu, l’histoire se remet en marche. Les vieilles structures craquent, les équilibres anciens se rompent sous l’effet conjugué des mutations géopolitiques, démographiques, technologiques et des aspirations toujours renaissantes des peuples à la liberté et au bien-être. La richesse moyenne des nations progresse, même si persistent d’immenses poches de misère. L’éducation et la connaissance se diffusent, même si subsistent trop de zones déshéritées. On ne peut pas penser ce monde-là, qui émerge sous nos yeux, avec les seuls concepts d’hier. On ne peut pas y agir efficacement avec les seules méthodes de nos pères.

C’est à la lumière de ces bouleversements que la relation culture/économie doit être revisitée. La culture a cessé d’être un luxe de riches ou un divertissement d’oisifs. Elle irrigue tous les processus de production modernes. Elle comble le besoin de sens qui habite la communauté humaine. La culture telle que nous l’entendons, c’est à la fois un levier pour l’action et un écosystème vital. Elle constitue un outil sans pareil de déchiffrage d’un monde complexe et d’adaptation à un environnement volatil. Pas de vraie créativité, qu’elle soit artistique, économique voire politique, sans un vrai substrat culturel.

Elle est aussi un écosystème hypersensible à l’action humaine, dont elle enregistre tous les impacts. À l’ère technologique, cette activité foisonnante peut affecter les équilibres délicats qui font la richesse culturelle : unité et diversité, matériel et immatériel, patrimoine et création, avant-gardes et grand public.

Il est temps d’inventer, entre ces deux activités fondamentales que sont la culture et l’économie, une articulation vertueuse qui ne se réduise pas à une pure instrumentalisation de la première et à une vaine stigmatisation de la seconde.

Il est temps de proposer un discours de la méthode grâce auquel toutes les potentialités agissantes de la culture seront valorisées et toutes les valeurs humaines de l’économie seront privilégiées.

Il est temps de jouer le durable contre le court terme, la création de valeur contre le gaspillage des ressources, la synergie contre le chacun-pour-soi, l’éthique contre l’irresponsabilité.

C’est ce territoire en friche, celui d’une mondialisation à visage humain et enracinée, que se propose d’explorer l’économie mauve.

Mauve, couleur de la créativité et de l’imaginaire, dont les nuances signent le reflet d’une adaptation aux spécificités de chacun, pour autant qu’elles respectent les libertés fondamentales.

De chaque opération de l’homme découle une empreinte culturelle, c’est-à-dire un impact qui façonne l’environnement culturel.

L’économie mauve représente la part des activités humaines qui concourent à améliorer cette empreinte, afin de favoriser en toute chose la richesse et la diversité culturelles. Cette économie est transversale et, relevant surtout de l’immatériel, s’avère peu consommatrice de ressources naturelles.

Elle porte les germes d’une nouvelle croissance, liée à une meilleure adaptation des entreprises au marché et à une plus grande efficacité dans leur fonctionnement, par la compréhension des ressorts des gens pour lesquels et avec lesquels on travaille.

Parce que nous avons tous intérêt à valoriser ce potentiel économique, il convient d’organiser dès maintenant la révolution mauve.

Signataires

  • Jean-Jacques Aillagon, président de l’établissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles
  • Bruno Bourg-Broc, président de la Fédération des maires de villes moyennes
  • Bernard Cerquiglini, recteur de l’Agence universitaire de la Francophonie
  • Gilles Ciment, directeur général de la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image
  • José Luís Dicenta, secrétaire général de l’Union Latine
  • Renaud Donnedieu de Vabres, ancien ministre
  • Mercedes Erra, présidente d’Euro RSCG Monde et directrice générale d’Havas
  • Pierre-Antoine Gailly, président de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris
  • Joëlle Garriaud-Maylam, sénateur membre de la Commission française pour l’UNESCO
  • Jérôme Gouadain, secrétaire général et fondateur de diversum
  • Claudie Haigneré, présidente d’Universcience (Cité des sciences et de l’industrie et Palais de la Découverte)
  • Jean-Hervé Lorenzi, président du Cercle des économistes
  • Jean Musitelli, ancien ambassadeur de France auprès de l’UNESCO
  • Alain Dominique Perrin, président de la Fondation Cartier pour l’art contemporain
  • Jean-Jack Queyranne, président de la région Rhône-Alpes
  • Odile Quintin, ancien directeur général à la Commission européenne
  • Bernard Ramanantsoa, directeur général d’HEC Paris
  • Jean-François Rial, président-directeur général de Voyageurs du monde
  • Pierre Simon, président de Paris-Île-de-France Capitale Économique

Pour plus d’informations, cliquez ici.

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La Berlinale renforce la contestation en Iran

Le film dramatique iranien Nader et Simin, une séparation du réalisateur Asghar Farhadi, a reçu l’Ours d’Or au festival du film de Berlin. L’attention accordée à l’Iran lors de la Berlinale de cette année revêt une dimension politique, estime le quotidien de gauche tageszeitung : « Le film d’Asghar Farhadi Nader et Simin, une séparation récompensé par l’Ours d’Or, montre la diversité d’une société assoiffée de liberté et d’autonomie, qui livre une résistance vivante et créative à l’oppression et à la tutelle permanentes. Le régime de Téhéran aura une nouvelle fois l’occasion de se voir confirmer l’échec de sa tentative désormais plus que trentenaire d’islamiser le pays et d’imposer au peuple sa propre version de la vie et de la morale. … On comprend aussi progressivement en Iran l’importance du rôle que jouent la littérature, l’art et la culture. … Le peuple iranien a besoin d’un soutien de l’étranger. L’attention accordée aux réalisateurs lors de la Berlinale encouragera certainement les milieux culturels à poursuivre leur travail en Iran. »

Source : BPB

 

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Une mission sur l’aspect culturel du Grand Paris

Nicolas Sarkozy a confié au conseiller d’Etat Daniel Janicot une mission destinée à faire des propositions sur la dimension culturelle du Grand Paris, a-t-on appris le 4 février auprès de l’Elysée.

En plus de ses ambitions en matière économique ou de transports, le chef de l’Etat souhaite faire du Grand Paris « l’une des plus importantes métropoles culturelles du monde, avec une identité forte et une visibilité incontournable sur la scène européenne et internationale, de nature à renforcer son intérêt touristique et l’influence de notre pays dans le monde ».

Dans ce cadre, M. Janicot doit faire des propositions « destinées à corriger les déséquilibres et les disparités territoriales existant entre le coeur historique de Paris et ses quartiers périphériques » en insistant sur « la culture dans les banlieues », a indiqué la présidence dans un communiqué.
Il doit également examiner « la complémentarité des institutions, des équipements et des événements culturels » et identifier « de nouvelles sources de financement pour la culture à l’échelle du Grand Paris ».

M. Janicot, qui doit rendre ses conclusions en septembre 2011, préside l’agence pour la vallée de la Seine chargée de conduire les projets d’aménagement culturel de l’île Séguin à Boulogne-Billancourt, l’ancienne usine historique du constructeur automobile Renault.

Source : La gazette des communes

P.S.: un grand merci à Evelyne Lehalle (Nouveau Tourisme Culturel), rien ne lui échappe !

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Programmes des forums régionaux « Culture pour chacun »

 

Voici les informations disponibles sur les forums régionaux organisés par les Directions régionales des affaires culturelles (Drac) dans la perspective du forum national qui se tiendra les 3 et 4 février 2011 sur le thème de Culture pour chacun.

  • Centre : le 17 décembre, à partir de 9h, au théâtre d’Orléans (salle Vitez). Un programme de cette matinée est en ligne. L’entrée est libre sur réservation (02 38 78 85 00) .
  • Champagne-Ardenne : le 1er décembre, à 14h, dans le hall Olivier Messiaen de la Drac, à Chalons-en-Champagne. Ce forum s’adresse aux partenaires institutionnels, collectivités, structures travaillant sur la démocratisation culturelle ou ayant un service de médiation en région Champagne-Ardenne. Un pré-programme est disponible. Contact : Christophe Poilane (christophe.poilane@culture.gouv.fr ).
  • Franche-Comté : le 3 décembre, à 10 h, dans la salle Malraux de la Drac, à Besançon. L’objectif de la réflexion est l’élargissement des publics touchés. La réunion des acteurs des secteurs culturel, socioculturel et politique permettra de rechercher une synergie opératoire. L’après-midi sera organisé en trois ateliers : Médiations et territoires, Médiations et publics et Nouvelles pratiques. Contact : Gianfranca Vegliante (gianfranca.vegliante@culture.gouv.fr )
  • Haute-Normandie : le 16 décembre, à 14h30, au Théâtre des 2 Rives à Rouen (Seine-Maritime). Après des présentations d’analyses et de projets culturels et artistiques, des tables rondes rassembleront des élus, des artistes, des programmateurs et des médiateurs. Ce forum est ouvert à tous. Le nombre de places étant limité, il est nécessaire de s’inscrire par courriel avant le 14 décembre auprès de la Drac (02 35 63 77 53 – veronique.taty@culture.gouv.fr ).
  • Provence-Alpes-Côte d’Azur : intitulé Démocratisation et pratiques culturelles à l’heure du numérique, le forum de la Drac Paca se tiendra le 15 décembre, de 10h à 13 h, aux Archives départementales des Bouches-du-Rhône, à Marseille. L’inscription se fait en ligne. Contact : Anne Dufourg (anne.dufourg@culture.gouv.fr ).
  • Rhône-Alpes : le forum régional Culture pour chacun, action culturelle& éducation artistique, initialement prévu le jeudi 28 octobre est reporté au vendredi 10 décembre, de 9h30 à 13h15, aux Subsistances à Lyon (Rhône). Le nombre de places est limité, il est demandé de confirmer sa présence par courriel, avant le 6 décembre, auprès de Sandrine Dutreuil (04 78 30 37 73 – sandrine.dutreuil@les-subs.com ).

 

Source : ministère de la Culture et de la Communication.

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Frédéric Mitterrand reste ministre de la culture et de la communication

La nouvelle nous est parvenue cet après-midi, Frédéric Mitterrand va rester le locataire de la rue de Valois au sein du nouveau gouvernement Fillon suite au remaniement qui va être dévoilé ce soir par le Secrétaire Général de l’Elysée. Du coup, il est important de se pencher en détail sur le texte publié début septembre qui posait le cadre de ce que tous les commentateurs (et le ministre lui-même) ont qualifié de « révolution copernicienne ».

Vous trouverez un exemplaire de ce fameux texte dans notre box Ressources .

Créé par André Malraux avec l’objectif de démocratiser la culture (les fameuses mais dépassées maisons de la Culture), cette exception française qui a été copiée depuis, a mué. Devenue la maison des artistes sous l’ère Lang, elle est désormais celle des industries culturelles et créatives et Frédéric Mitterrand l’assume sans ambiguïté. Sa mission prioritaire est désormais « d’accompagner les mutations considérables que connaîtra la création artistique avec l’essort du numérique et le poids grandissant du marché ». Tout est dit avec ces deux mots « numérique » et « marché ». La culture n’est plus simplement ce supplément d’âme dans un monde de chiffres, mais un secteur d’activité économique à part entière. Ce n’est pas un scoop, loin de là. Nous reviendrons en détail sur cette nouvelle ère qui s’annonce car si ce texte que nous qualifierons de « fondateur » constitue une nouvelle doctrine en matière de politiques culturelles, il se garde bien de ne pas traduire (pour le moment) le changement de logiciel qui est en train de s’opérer et qui se prépare depuis de longs mois. Moralité, c’est une nouvelle guerre de tranchées qui a déjà commencé durant laquelle chacun s’efforcera de ne proposer aucune solution d’avenir, trop occupé à mener le combat sur le terrain idéologique. Nous en voulons pour preuve la réaction des sections CGT-CFDT-FSU (Drac Stap Pays de Loire) du 11 octobre dernier :  « Au delà d’un contexte social tendu qui ne facilite pas les rencontres, un certain nombre d’éléments amènent et inclinent l’intersyndicale Drac/Stap des Pays de la Loire (CGT,CFDT, FSU) à ne pas souhaiter rencontrer malgré leur proposition, le secrétaire général du ministère et des membres du cabinet ce vendredi 15 octobre lors de leur venue en Drac des Pays de la Loire .

En premier lieu sur le plan social, peut-on continuer à entretenir dans ce ministère, que ce soit à l’échelon central ou local, un dialogue social en trompe l’œil cumulant arguments technocratiques abscons, propos démagogiques et parole apaisante, le tout sans perspective et sans objectif.
Ensuite sur la plan culturel, comment comprendre que soit mis en avant le nouveau concept de «la culture pour chacun » en lieu et place de la culture pour tous, ce qui loin de prôner une démocratisation culturelle, fondement du Ministère depuis Malraux, le situe dans l’ère du temps où toutes les cultures se valent, chacun devant recevoir ce à quoi son appartenance sociale ou communautaire lui donnera droit, l’exigence culturelle étant maintenant assimilée à de l’intimidation sociale.
Et enfin, sur un plan général, il y a la réforme de l’ Etat, RGPP1 et RGPP2, et sans doute RGPP3 qui, loin de situer l’agent et encore moins l’usager au cœur des réformes de l’Etat, n’ est qu’une entreprise idéologique de démantèlement et à terme de délabrement du service public relayée au niveau local sans états d’âme.
Dans ce contexte synthétiquement dressé, les représentants du personnel ne veulent plus participer au jeu de dupe d’un pseudo échange avec des représentants ministériels qui, oin de n’être que des exécutants, vont jusqu’à justifier avec zèle les termes d’une politique sans âme. »

 

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Culture et politique, où est le problème ?

Culture et politique, où est le problème ? C’est la question qui était posée à la maison des Métallos de Paris le lundi 11 octobre. Pour y répondre, une poignée de spécialistes du débat culturel et … une élue, elle-même issue du secteur culturel, seule représentante de sa catégorie. Cherchait-on vraiment une réponse à la question posée ? Il suffisait d’examiner la composition de la salle pour l’obtenir et déplorer, une fois de plus, la tendance des débats sur la culture à tourner à l’entre – soi.

Culture et politique où est le problème ? Cette question à laquelle il valait mieux ne pas répondre, autre caractéristique du débat culturel, était posée à partir d’un ouvrage intitulé « La bataille de l’imaginaire ». Au vu des débats, il paraissait évident que cette bataille était gagnée : l’imaginaire culturel s’est tellement émancipé de la réalité politique que la fiction de politique culturelle qui en résulte ne résiste plus, et depuis longtemps, à l’épreuve du réel.

Soucieux de ne pas froisser le milieu culturel, le monde politique a préféré lui cacher cette terrible vérité. D’exception culturelle à la française en bataille contre la « directive services », il l’a progressivement mis sous cloche, isolé du pays réel à la manière d’une réserve d’indiens. Et maintenant que la bulle menace d’exploser, l’homme politique évite prudemment les éclaboussures, raison pour laquelle il préfère se tenir à l’écart des débats sur la culture.

A quoi assiste t-on au juste ? Tout simplement à la fin d’un cycle, long de plus de plusieurs siècles, qui vit le mécénat royal évoluer lentement vers un système d’aide publique aux arts et aux artistes. Et c’est ce système plutôt astucieux que l’on nomme abusivement « politique culturelle », alors qu’il n’a rien de politique et pas grand-chose de culturel. Pourquoi ce système ne tient-il plus debout ? Parce qu’après des années de croissance les moyens publics se sont mis à stagner mais aussi, et même surtout, parce que l’objectif de démocratisation qui lui servait de justification est dépassé.

Il ne s’agit plus d’apporter « de la culture » (et encore moins LA culture) à ceux qui en seraient dépourvus. A l’ère de la mondialisation des échanges et de la généralisation d’Internet, le nouvel horizon de la politique culturelle ce devrait être celui du dialogue des cultures ; son nouvel impératif celui de la préservation de la diversité ; son nouveau chemin celui qui mène de la pluralité des formes et des contenus à l’unité de l’être humain. Alors oui, pour construire ce futur, il faudra bien des débats entre acteurs de la culture et élus politiques, il faudra surtout un peu plus de discernement et de courage et de part et d’autre.

Denis Declerck*

Du même auteur :

 

*Denis Declerck est directeur de l’action culturelle à la communauté d’agglomération d’Evry Centre Essonne. Avant cela, il a été directeur de théâtres à Vienne (1989-1992) puis à Béziers (1992 – 1999) avant de rejoindre le ministère de la culture : conseiller théâtre et action culturelle à la DRAC Nord Pas de Calais (1999 – 2004) puis inspecteur (2004 – 2009). Il a notamment été le coordonnateur et le rapporteur général des Entretiens de Valois. Denis Declerck est titulaire du Master 2 “Direction de projets culturels” délivré par l’Observatoire des Politiques Culturelles  et Sciences – Po Grenoble (1997).

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A propos du PAP 2011

La nuit dernière (0h17 s’il vous plaît), Jean-Michel Lucas et le Doc Kasimir Bisou nous ont fait le plaisir d’une livraison pétillante : une analyse ultra concise du volume « Culture » des Projets Annuels de Performance (PAP), annexe au projet de loi de finances pour 2011. Impossible de rester indifférent à cette nouvelle contribution au débat sur l’avenir de la culture dont les politiques sont plus que jamais en besoin de régénération. Rien de mieux pour démarrer le dimanche en fanfare.

 

 

Bonjour à tous,

puisque dix pages, c’est toujours trop long à lire, le Doc Kasimir Bisou tente la formule twitter améliorée en 78 lignes sur le PAP2011 coté culture :

« Certains d’entre vous se rappellent peut être que dans mes articles sur la LOLF et le PAP de la mission culture, (notamment sur irma.fr) j’avais forcément ironisé sur cet indicateur stupide qui voulait que la BNF soit évaluée par le taux de satisfaction des 1500 passants à qui on demandait s’ils étaient « satisfaits » de la noble institution. L’ironie s’imposait car légitimer 507 000 euros d’argent public par jour par la simple « satisfaction » du premier venu avait un coté « j’m’enfoutiste » qui aurait dû choquer même les rédacteurs les plus obtus des PAP de la LOLF !

(j’en connais encore qui ne savent pas ce qu’est le PAP, projet annuel de performances, qui reste le document nécessaire pour que le ministère de la culture obtienne des crédits du Parlement, ce qui n’est quand même pas négligeable dans une démocratie dont la force vient aussi de son formalisme.)

En lisant le PAP 2011, j’ai constaté que je n’aurai malheureusement plus le plaisir d’ironiser !! Car, enfin, c’est fait : cet indicateur (de la stupidité évaluative) a disparu.

Vous pensez peut être que je tire un peu de fierté de cette disparition aussi définitive que discrète !! Loin de moi cette pensée car  dans le PAP 2011, la situation éthique de la BNF est encore pire que ce que je pouvais imaginer !

En effet, la Bibliothèque Nationale de France a changé de mission publique : elle a disparu de la mission « Patrimoine » ! En tout cas, elle n’est pas revendiquée par l’Etat comme le lieu protecteur du  patrimoine écrit universel pour l’Humanité, dont les vertus émancipatrices mériteraient à la Malraux un apport d’argent public permettant de couvrir un cout  atteignant maintenant 514 000 euros par jour !!). Aucune chance d’imaginer cet argument ! Non, pour ce prix là, il faut être sérieux et faire dans le lourd : la BNF est donc maintenant intégrée à la mission ‘médias livre et industries culturelles » qui n’a qu’une vérité : faire face à la compétition marchande des cultures !

Les premières lignes du PAP 2011 pour cette mission (programme 180) ne mentent pas : la vérité publique n’est plus dans l’œuvre à valeur universelle, elle est dans la concurrence :
« Dans un environnement de plus en plus concurrentiel et marqué par d’importants bouleversements technologiques, les défis auxquels les médias, le livre et les industries culturelles doivent faire face sont nombreux. Le passage au numérique, la modification des modes de consommation, la concurrence internationale accrue et les besoins nouveaux
de l’audiovisuel public sont autant de gageures auxquelles les différents bénéficiaires des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » auront à répondre dans les trois prochaines années. »

page 8, signé François Fillon et Frédéric Mitterrand, excusez du peu !

Je le sais déjà : les lecteurs de Frédéric Martel et de ses amis politiques me diront, eux aussi, que c’est la voie du réalisme : la culture, ses acteurs comme ses objets, doivent rapidement s’affronter à la compétition culturelle imposée par tous les marchands du monde. et quand  on lit ces vérités sur la puissance du marché pour l’avenir de la culture, on se croirait effectivement ( private joke pour les « personnes » habitant la communauté urbaine bordelaise) dans un colloque sur la « Ville Créative » dont même plusieurs villes de gauche sont friandes!

Sans doute, peut-on considérer qu’il est pragmatique de se concentrer sur la vente des services culturels pour qu’ils deviennent  des armes de l’attractivité du territoire, c’est-à-dire rien moins que des munitions de la guerre culturelle de tous contre tous ! C’est une éthique comme une autre, mais est ce bien raisonnable pour les autorités politiques de réduire leur ambition culturelle à cet exercice de vendeurs, agressifs quoique artistiquement rayonnants, de services culturels compétitifs, comme si l’enjeu culturel n’était qu’un enjeu de secteur économique ?

On aurait préféré que les  rédacteurs du PAP  soumettent cette « éthique du rentable » à l’impératif culturel premier pour la responsabilité politique, à savoir la construction du  vivre ensemble de cultures à facettes multiples, nécessairement solidaires les unes des autres en tant que contribuant chacune à la construction de l’Humanité…  Sans se contenter d’inverser la donne en mettant le marché en premier et, à la traine, les valeurs culturelles. On comprendrait mieux si les députés rappelaient que la construction de l’Humanité, avec  l’extraordinaire hétérogénéité des libertés ( Amartya SEN) qui l’enrichit, ne pouvait se réduire à transformer la BNF en concurrent de Google ! Car j’ai  bien lu page 9 du programme 180 :« Le budget de la Bibliothèque Nationale de France sera recentré sur ses missions stratégiques et notamment la mise en place d’une bibliothèque numérique de référence ».

Pour penser le futur  du monde dans ses complexités interculturelles, il  n’y aurait rien eu d’indécent à considérer que l’enjeu culturel national relevait d’abord de la nécessité de revendiquer le « respect de droits culturels » des personnes, comme premier des droits humains, pour mieux élaborer, à chaque échelle de territoire, la part de culture commune qui rend la vie ensemble vivable.

C’est manqué, c’est cruel car cette éviction de l’éthique culturelle humaniste se lit dans un texte où l’exécutif soumet ses intentions politiques aux élus de la nation, donc dans un texte qui devrait faire honneur à la démocratie dans son formalisme salvateur.

A vrai dire, tout ceci n’a pas d’importance car le PAP qui engage la république n’est lu par personne. Trop long et trop copieux et moins rigolo que le « Mainstream » de Martel qui sait, lui, nous distraire en nous donnant même la couleur des triporteurs de Mumbai ( jaune et noir page 237).

Pourtant quand le PAP 2011 se vante de développer une « nouvelle politique de la lecture publique » pour annoncer que l’Etat y consacre 31,5  millions d’euros ( en cherchant bien)  alors que la vérité du texte est de recycler la BNF  en concurrente de Google bis pour une somme totale de 206 millions d’euros, on se dit que le rédacteur s’est un peu perdu dans la hiérarchie des arguments !!

Mais comme on n’a pas le temps de tout lire, me disait récemment un député d’opposition, le PAP ne prend guère de risque à manier la langue de bois. Tant pis pour le débat public, tant pis pour la démocratie, tant pis pour l’éthique de la politique culturelle.

Comme vous ne trouverez pas le PAP  culture sur le site du ministère ( que je n’ose plus appeler)  de la culture, je vous mets en fichier joint le texte des deux missions évoquées. A lire comme le roman d’une démocratie à l’éthique torturée !!!

Quant au genre twitter, ce n’est pas encore pour aujourd’hui, mille excuses,

A la prochaine fois, peut être aux « Métallos » le lundi 11 octobre, avec une rencontre sur « la bataille de l’imaginaire » et un rappel des enjeux de l’éthique de la dignité comme fondement pour reconstruire une politique de la culture en société de liberté.

Bien respectueusement pour ceux qui ont été jusqu’au bout
le doc KB et Jean Michel Lucas

 

Pour prendre connaissance du PAP Culture 2011, vous pouvez télécharger ses deux volumes dans notre Box Ressources.

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Fréquentation des Etablissements Publics du ministère

Une trentaine d’établissements publics sous tutelle du ministère de la Culture et de la Communication ont pour vocation d’accueillir du public : 2 bibliothèques, 13 établissements à caractère patrimonial (musées et monuments), 6 établissements de spectacle (théâtres et opéras) et 5 établissements à caractère polyvalent (auditorium et musée de la musique pour la Cité de la musique par exemple).
La présente étude fait le point sur la fréquentation de ces établissements. En 2009, la fréquentation totale (payante et gratuite) de ces établissements s’élève à 34 millions d’entrées.

Les musées et monuments sont les plus attractifs auprès du public, en particulier les plus importants en termes de notoriété nationale et internationale, qui participent de l’attrait touristique de la capitale française.

D’une façon générale, le nombre d’entrées tend à augmenter, une hausse qui accompagne souvent une diversification des activités proposées et des dispositifs mis en œuvre pour favoriser l’accès au plus grand nombre.

Pour consulter le document, cliquez ici ou bien téléchargez-le directement à partir de notre Box Ressources.

Source : DEPS, ministère de la Culture et de la Communication.

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Pourquoi je suis de gauche et j’aime l’appel au secteur privé

Photo Michael Zumstein / Agence Vu

Un de nos membres a souhaité réagir à propos d’un commentaire déposé par un intermittent du spectacle sur lesinrocks.com, suite à un article qui faisait état de la mobilisation des professionnels de la culture à Avignon. Au regard du contexte actuel particulièrement tendu du secteur, l’auteur a choisi de publier son article anonymement afin de ne pas connoter le débat par la seule indication de son nom et de ses fonctions.

La réforme territoriale, le désengagement de l’Etat : des sous ! Des sous ! Et les sous de tous les français, s’il vous plait, car nous, nous  travaillons pour le Bien Public, dans l’Intérêt Général, on nous le doit, ce fric, et l’argent privé, celui des entreprises, ne fait que des trucs nuls, les pays qui ont un autre système que le notre sont aussi des nuls!

Les professionnels du spectacle ne sont pas unis, car entre l’intermittent qui répond sur le blog et le directeur de l’Opéra de Paris, il y a un océan, mais tous deux diront la même chose :

  • On veut être libre de nos choix  (de créer, de programmer, de mette en scène, etc…)
  • On veut aussi que nos « tutelles », qui le seront donc le moins possible, nous accordent le droit de la prise de risque, dans ces choix. Autant dire d’échec possible.

Cinquante ans que ce système existe, mis en place par l’Etat puis copié par les satellites ( Communes puis département et enfin les Régions, plus jeunes).

Constat au bout de 50 ans :

1 – Tout le monde cotise pour la culture, paye pour la culture, la résidence d’artiste, la prise de risque du  metteur en scène, mais le chômeur de Mende a juste une chance sur 100 millions de bénéficier d’un abonnement à l’Opéra.

2 – Un jeune sur deux dit ne pas vouloir aller dans un musée, et sait motiver son refus : parce qu’on s’y ennuie, parce que ce n’est pas bien, parce qu’il préfère autre chose…(cf étude J et Sport 2006).Et ce, malgré trente bonnes années de collaboration et d’efforts financiers entre la culture, les musées et l’éducation nationale.

3 – Les plus déshérités, par l’isolement, la pauvreté, le handicap, sont très loin de fréquenter régulièrement les grands festivals du pays, très loin aussi d’aller de temps en temps dans les musées, les CDN, ou d’étudier 3 ou 5 ans dans les écoles d’art (cf étude 2003).Les expériences pour les « attirer » deviennent d’ailleurs de plus en plus pathétiques, au vu des moyens consacrés par rapport au budget culturel global du secteur public .

Le système de culture publique, quasiment soviétique, qui ne repose que sur la foi de lendemains meilleurs, « Continuons ainsi, on finira bien par démocratiser, dit-on chaque jour pour faire patienter les cotisants…» est tout de même la Bible partagée de l’intermittent et du directeur de l’Opéra.

Et l’Amérique ?

N’a-t-elle pas de bons artistes ? De bons musées ? De bons cinéastes ? De bons écrivains ? Et le Royaume-Uni ? Sa production artistique est-elle nulle, mauvaise? Ses lieux cultuels sont –ils rasants, vides, insipides ? Eh bien non.

Aucun autre système culturel, dans le monde, n’est financé, comme en France, par l’ensemble des contribuables, (L’URSS autrefois ? ). Même si, dans ces pays les financements publics existent aussi, mais ne prennent pas la même forme (celle de subventions directes et souvent reconductibles). Simplement, les professionnels de la culture, ailleurs,  acceptent le jeu des acteurs «  Si j’ai de l’argent public je dois avoir une fréquentation optima ») ainsi que l’évaluation de leur travail.

Cette Culture que le monde entier nous envie !

En France,  nous avons une expression fétiche : « Cette Culture, mais aussi cette  Justice, Médecine, Université, Education nationale…, au choix) que le monde entier nous envie !»

Et  oui, évidemment, et on comprend pourquoi : nulle part ailleurs les professionnels ne sont aussi gâtés, petites corporations qui se tiennent les coudes à l’abri de l’Intérêt Général, leur parapluie préféré, et qui, au quotidien, ont droit à l’erreur, à prendre des risques, à revendiquer des tutelles les plus légères possibles, une fois l’argent et les moyens alloués, ou à échapper à l’évaluation, à considérer qu’une forte fréquentation est suspecte, à un régime spécial de chômage, ou  à imposer à 200 000 habitants leur thèse de troisième cycle sous forme d’expo temporaire, avec le vocabulaire qui va avec ! Thèse ou encore leur auteur-fétiche, leur petite passion perso, mais « C’est l’avenir qui jugera de ma valeur,  comme pour les Impressionnistes ! » Autre expression-paravent sacrée, avec celles du Bien Public et  de l’Intérêt Général, celle, plus romantique, de l’artiste maudit, le producteur maudit, etc.. .

Dans le milieu professionnel de la culture, on revendique le cool, mais on accepte mal le jugement du peuple (démagogie, populisme). C’est symptomatique, on fustige même ce qu’il mange, comme cette phobie anti Mac Do, la nourriture des plus pauvres d’entre-nous, pourtant. (Au passage : Mac Do a  remplacé le Coca Cola d’autrefois). Ou ce qu’il aime (Block busters du cinéma).

Les jugements qui comptent : comme on « enseigne » et on « fait découvrir » aux plus pauvres, on ne peut attendre d’eux un jugement.  Seul le jugement de ses pairs compte, avec qui on fait un match permanent du « Je suis meilleur que toi ! ». A la rigueur, on veut bien faire un deal en acceptant un compromis (un artiste, un producteur…) avec l’Etat, et l’un de ses chouchous imposés, car l’Etat reste le seul juge, prestigieux dans un CV, une conversation entre amis. L’Etat est le Garant de l’Intérêt Général, on y reviendra.  Mais pas plus….

Les entreprises ? Satan ! Les mécènes ? Tous des riches, donc des ripoux ! Exit donc le jugement du peuple, des plus pauvres et celui des entreprises… Nous sommes des professionnels, nous savons ce qui est bon pour vous, même si vous ne le savez pas, et basta ! La preuve ? Notre public habituel, les profs et, en général, toute la bonne petite bourgeoisie qui s’abonne dès l’ouverture de la saison  théâtrale,  nous suivent! Vous avez dit élitiste ?

Attendons ! Attendons, tout cela va porter ces fruits, cette profusion, tous ces moyens, ces conditions de travail super, cette liberté, ces subventions, cette absence d’évaluation qui pourrait devenir une sanction. La démocratisation va bien arriver un jour, non  ???

OK, mais SEULEMENT si on change ces pratiques corporatistes et si on réfléchit au lieu de réciter un catéchisme, si on redonne la parole aux élus, parce que ce sont eux, en démocratie, qui représentent les gens. Si on se contente de l’intérêt commun, sans invoquer l’Intérêt Général et la République, car le Pen est républicain et Sarkozy aussi. Fermons les parapluies et regardons le chantier.

Par où commencer, d’ailleurs ?

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Quelle peut être la place de l’artiste dans une société « du savoir » ?

Deuxième chapitre de notre série de publications issues des rencontres débats passionnants qui ont eu lieu au sein du Grand Lyon dans le cadre du cycle de rencontres « Grand Lyon Vision Culture » et dont son concepteur Pierre-Alain Four* nous fait l’honneur et l’amitié de nous autoriser la diffusion. Au programme cette fois-ci, la place de l’artiste dans une société « du savoir ».

Bien loin de la place spécifique et coupée du monde que lui assigne la vision Romantique, l’artiste est aujourd’hui un individu qui aborde dans son travail de création, toutes sortes de sujets, de thèmes, de questions, puisant dans un répertoire de savoirs et de connaissances extrêmement hétérogène. Par ailleurs, son identité et la nature de son activité se réfèrent aussi à de très nombreux registres : intellectuel, critique militant, découvreur, bricoleur créatif… 

L’artiste est aujourd’hui un acteur à même d’associer et de faire tourner concepts, idées et technologies nouvelles comme d’autres moins récentes. Cependant,
ses dispositions et facultés sont méconnues et, entre les représentations relatives à son activité et la réalité du travail de l’artiste, il y a souvent un monde.

Pour consulter le rapport en ligne, cliquez ici. Vous pouvez également le télécharger dans notre box « Ressources ».

Pour consulter le chapitre précédent, cliquez ici.

*Docteur en sciences politiques (IEP de Paris), Pierre-Alain Four, a été chercheur associé au Pacte-CNRS (IEP de Grenoble) et est membre fondateur de l’Association pour la promotion et l’organisation de la recherche en sciences sociales (Aporss), puis de FRV100. Il a notamment travaillé sur les Fonds régionaux d’art contemporain (Frac), la vie intellectuelle en province et d’une manière générale sur de nombreuses questions culturelles et artistiques. Il a notamment analysé les relations entre artistes et amateurs, et la place des artistes insérés dans des dispositifs de politique publique éloignés de leur champ professionnel d’origine (politique de la ville par exemple). Il a aussi été chargé de cours à l’Université de Montpellier III, à l’école des Beaux-Arts de La Réunion, à l’université Lyon2, etc. Il est actuellement veilleur culture pour la DPSA où entre autre missions, il anime et conçoit le cycle Grand Lyon Vision Culture.

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Médiation culturelle : l’enjeu de la gestion des ressources humaines

Au cours des 30 dernières années, les activités de médiation culturelle ont connu un essor continu dans l’ensemble des domaines artistiques et culturels, au sein des institutions et sur les territoires, notamment sous l’impulsion des politiques publiques de la culture, de la ville et de l’emploi. Pour autant, les activités de médiation ne constituent pas aujourd’hui un ensemble homogène ; le métier et les compétences, divers selon les établissements et les secteurs, restent peu reconnus.

Au moyen d’une méthode inédite qui se décline sous la forme de 6 configurations professionnelles, l’étude dresse un état des lieux actualisé des situations professionnelles rencontrées (contenus d’activité, statuts d’emploi, conditions d’accès et identités professionnelles) et identifie l’enjeu majeur que constitue la gestion des ressources humaines pour la professionnalisation des activités de médiation.

Over the last 30 years, work within cultural events promotion has been growing steadily in all cultural and artistic fields, within institutions and across regions, driven by public policies on cultural, civic and business life.

As such, cultural promotion now no longer covers a consistent range of activities; the profession and its related skills vary widely across institutions and sectors and with little recognition.

Using a completely new method which designates 6 separate professional categories, this study gives an up-to-date review of professional situations covered (activity, employment status, entry conditions and professional identity) and identifies the major issue of human resource management in the professionalisation of cultural promotion activities.

Source : DEPS, ministère de la Culture et de la Communication.

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Cinquième édition du festival Croisements

La France organise ce mois-ci en Chine son plus grand festival culturel dans le monde, a annoncé jeudi son ambassadeur à Pékin, évoquant les manifestations multidisciplinaires qui vont être présentées au public chinois pendant deux mois dans le cadre de « Croisements ». Cette 5e édition du festival Croisements doit être inaugurée le 15 avril pour se clore le 21 juin à Shanghai, lors de la Journée France qui tombera le jour de la Fête de la musique sur le site de l’exposition universelle dans la métropole de l’est de la Chine, a expliqué Hervé Ladsous. « Cette année ce sont 200 manifestations qui vont se dérouler dans 27 villes chinoises, contre 150 l’an dernier dans 21 villes », a expliqué M. Ladsous, « le festival Croisements est devenu le plus gros festival français dans le monde ». Le cinéma français sera représenté par 13 longs métrages et 12 courts métrages alors que la France tente d’élargir la diffusion de ses films sur l’immense marché chinois, encore peu ouvert. Des acteurs comme Vincent Perez et Josiane Balasko sont attendus en Chine pour la projection de « Demain dès l’aube » (Denis Dercourt) et « Le hérisson » (Mona Achache). Pour la première fois, les Rencontres d’Arles de la Photographie participeront à Croisements. Des expositions comme « Abysses », de Claire Nouvian, qui explore les grands fonds, seront présentées. Côté musique, le chanteur-compositeur de rock M, ou Matthieu Chedid, doit donner un concert le 21 juin à Shanghai, le jour où la France « fera une magnifique fête de la musique, la première à Shanghai », a dit M. Ladsous. Izia, fille de Jacques Higelin, chantera également en Chine. Pour la danse classique, trois grands ballets où se retrouvent danseurs et chorégraphes français et chinois seront sur scène. Les Chinois de Pékin, Shanghai ou Canton curieux de danse contemporaine pourront voir notamment « Blanche Neige » de la compagnie Angelin Preljocaj, ballet pour lequel les costumes sont signés du couturier Jean-Paul Gaultier. Des expositions de peinture figurent aussi au menu de Croisements, de même que des pièces de théâtre, des ateliers avec des écrivains français et des concerts de musique classique. « Il y en aura pour tous les goûts et tous les publics », a dit M. Ladsous, « c’est la richesse de la création artistique française que nous voulons montrer à tous les publics ». L’édition 2009 de Croisements avait été fréquentée par 250.000 Chinois, généralement des citadins aisés.

Source : AFP

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A propos du Conseil pour la Création Artistique

Le 19 février dernier, un article du journal Le Monde a particulièrement attiré notre attention. Intitulé « Faut-il accepter l’argent du conseil piloté par Marin Karmitz ? », l’article traitait principalement de deux questions : 1) du caractère éthique et moral du fait que certains bénéficiaires du soutien financier du CCA y siègent également, pointant ainsi leur position de juge et partie, position qui, dans le pays où le cumul des mandats est une « tradition républicaine », ne serait dans la culture ni une pratique courante, ni une pratique acceptable… ; 2) de la provenance des crédits mobilisés pour financer le CCA, crédits dont les détracteurs du CCA sont certains qu’ils ont été ponctionnés sur le budget du ministère de la Culture et de la Communication.

C’est dans sa réponse à la question sur la mobilisation budgétaire du ministère de la Culture et de la Communication, qu’une phrase de Marie Descourtieux, secrétaire générale du CCA, mérite que l’on s’interroge : « nous n’avons pas encore de personnalité juridique, donc l’enveloppe de 2010 transite par le budget de la culture. Mais c’est un crédit supplémentaire. »

Si sur le fléchage et la mobilisation du financement, la discussion est très vite expédiée par Marie Descourtieux (les fonds proviendraient en fait du Haut Commissariat à la Jeunesse), c’est sur la mention du caractère temporaire de l’absence de statut juridique du CCA qu’il convient effectivement de s’attarder en profondeur car c’est peut-être là que ce révèle pour la première fois la vraie vision politique de la réforme des politiques culturelles et de leur ministère, ministère qui fêtait il n’y a encore pas si longtemps son cinquantenaire dans l’apathie la plus totale.

C’est en effet en dehors de tout discours politique et idéologique que la réforme peut se décrypter, dans cette phrase de Marie Descourtieux qui est tout sauf anodine. En termes de pédagogie de la réforme, c’est plus que faible mais cela a surtout le très grand avantage d’éviter une confrontation directe sur le vrai sujet avec les professionnels de la culture des secteurs publics et privés, professionnels qui sont dans un état de préoccupation et de faiblesse jamais atteint jusqu’à présent.

Disons-le tout net, c’est un tournant qui est en train de s’opérer pour la politique culturelle à la française, tournant sur le plan de sa doctrine et de son esprit depuis la création du ministère, tournant stratégique et opérationnel qui compte tenu de la feuille de route fixée par la RGPP (et des conditions dans lesquelles celle-ci se met en oeuvre) mériterait que les véritables objectifs soient clairement expliqués et débattus.

On peut être d’accord ou pas sur le fait que c’est une part des prérogatives du ministère de la Culture et de la Communication qui sont données au CCA sur « simple » décision élyséenne (ce n’est évidemment pas aussi simple) mais personne n’a relevé que cette phrase de Marie Descourtieux contient toute la problématique : attribuer un statut juridique au CCA. Quel que soit ce statut, c’est donner au CCA une existence distincte de celle du ministère. Personne ne s’interroge aujourd’hui sur les conséquences et sur le sens d’une entité juridique distincte du ministère du la Culture et de la Communication qui bénéficierait de fonds qui ne sont pas inscrits dans la loi de programmation budgétaire de l’Etat.

Locomotive ou laboratoire de la création et de l’innovation culturelle en France ou pas, on peut voir l’émancipation du CCA sous l’angle franco-français où l’Elysée cherche à satelliser au plus près du pouvoir central des marges de manoeuvres signifiantes et significatives extraites des lourdeurs administratives des ministères ; mais on peut aussi voir que le CCA prend la tournure d’une entité juridique séparée d’une administration centrale, à la manière de l’Arts Council of England ou du National Endowment for the Arts aux Etats-Unis.

Comme rien ne filtre ou presque du CCA, le monde culturel est particulièrement à l’affût de ce qui s’y prépare, les syndicats allant par exemple jusqu’à dénoncer une « ministère de la culture bis » qui déposséderait à terme l’actuel ministère d’un certain nombre de ses missions régaliennes, une sorte de réforme déguisée pour contourner la difficulté du ministère à se réformer et pour à terme le faire disparaître. Il est clairement reproché au CCA d’être l’instrument d’une tentative d’inversion des rapports entre institution et professionnels du secteur, au profit de l’Elysée. Mais est-ce vraiment cela dont il s’agit au fond ? C’est tout à fait possible puisque ce qui est visible pour le moment n’est qu’instrumentalisation de l’institution par le politique. Or ni la rue de Valois, ni l’Elysée, ni Bercy, ni le CCA ne se sont vraiment expliqués sur la genèse d’une telle initiative, nous pensons évidemment à ce qui est malheureusement absent des discours et des communiqués de presse, c’est-à-dire à une pédagogie de la réforme du modèle, la proposition d’un projet sociétal qui ne se contente pas de dire que tout ce qu’on tente d’y faire est historique mais qui essaie de contribuer à ce que l’institution soit en phase avec la société.

Pourquoi cette pédagogie est-elle présente dans d’autres secteurs économiques et absente du secteur culturel ? Est-ce par peur du conflit, par mépris, par manque de compétence, par absence de vision politique ou parce que réformer la culture et l’institution culturelle est considéré comme impossible ? 
On peut toujours dire que réformer le secteur culturel est voué à l’échec comme l’expression d’une certaine fatalité bien connue mais le fait est que le sujet est ultra sensible car il touche au cœur du modèle sociétal français, modèle qui évolue à la marge avec son temps mais dans des temporalités différentes pour le citoyen, l’acteur culturel, l’institution ou le responsable politique. 
Sans un certain nombre d’explications, il est impossible (même avec la meilleure des bonnes volontés) de déceler le bien-fondé du CCA et du mouvement auquel il participe. On doit pour le moment se contenter de lire entre les lignes, dans un climat qui n’est pas propice au débat contradictoire.

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Un nouveau regard sur l’éducation artistique et culturelle

Comment prendre en compte les mutations des pratiques culturelles en matière d’éducation artistique et culturelle ? Et, notamment, comment tenir compte de l‘évolution massive de ces pratiques en direction du numérique (jeux vidéo, téléchargement de musique et de films, développement d’Internet) ? Telles sont les questions sur lesquelles se pencheront les différents intervenants du séminaire européen qui se tiendra à Berlin-Genshagen les 17 et 18 décembre prochains au siège de la fondation franco-allemande pour la culture. Avec, entre autres objectifs, la présentation par le groupe d’experts européens sur l’éducation artistique et culturelle mis en place le 21 mai 2008 par la Commission européenne, de plusieurs exemples de bonnes pratiques et projets en ce domaine.

Source : ministère de la Culture et de la Communication

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L’association des scènes nationales évolue

L’Association des scènes nationales a récemment modifié ses statuts afin de mieux défendre et valoriser l’ensemble de ses structures. Son ambition : devenir un véritable laboratoire d’idées, un outil d’échanges et de réflexions entre ces scènes pluridisciplinaires qui constituent un réseau unique en son genre, essentiel à la création ainsi qu’au développement des publics et des territoires.
 Les 70 scènes nationales sont dédiées à la rencontre de tous les arts du spectacle vivant, mais aussi, pour nombre d’entre elles, des arts visuels. Leur programmation reflète les principaux courants de la production actuelle mais aussi des approches artistiques plus singulières. Elles sont réparties sur l’ensemble des régions métropolitaines, ainsi qu’en Guadeloupe et Martinique, et situées en grande majorité dans des villes moyennes, au cœur d’agglomérations de 50 à 200 000 habitants où elles s’attachent à conjuguer des responsabilités artistique, publique et professionnelle. 
À travers l’association, elles souhaitent mieux échanger sur la diversité de leurs pratiques et partager leurs savoir-faire, et se donner les moyens d’avoir une réflexion collective sur des sujets qui les préoccupent et qui font leur quotidien, comme la question du territoire et du rapport au public, de la médiation, du rôle de conseil aux artistes et de leur accompagnement, des actions culturelles conçues avec d’autres structures plus petites de leur territoire… 
Les premiers groupes de travail devraient porter sur : le rapport au territoire, la place du cinéma dans leur champ d’action, et la mise en place d’une base de données co-gérée avec la mission pour les réseaux de diffusion pluridisciplinaires de la Direction de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles (DMDTS / ministère de la Culture et de la Communication).
Le nouveau conseil d’administration est composé de neuf directeurs et de trois présidents de scènes nationales. Le bureau est présidé par Michel Orier, directeur de la MC2, scène nationale de Grenoble. Jean-Paul Jury, président du Lux, scène nationale de Valence, en est le vice-président.

Source : ministère de la Culture et de la Communication.

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Le transfert des monuments vers les collectivités soumis au Parlement

Paru récemment dans le toujours aussi bien informé Journal des arts, un article sur l’adoption pour le moins discrète d’une modification dans le projet de loi de finances pour 2010 qui permet de se passer de l’avis du ministère de la Culture pour transférer les monuments historiques protégés appartenant à l’Etat aux collectivités locales qui en feront la demande. Cette modification de l’article 52 du projet de loi déclenche de vives réactions et les déclarations du ministre de la Culture n’ont pas convaincu, c’est le moins qu’on puisse dire.

C’est en effet un article ajouté en catimini au projet de loi de finances pour 2010, à la demande du Premier ministre, sur lequel Frédéric Mitterrand s’est bien gardé de communiquer. Lors de son audition à l’Assemblée nationale, le 3 novembre, le ministre de la Culture a pourtant pu constater que la méthode n’avait guère été appréciée. Plusieurs députés ont protesté contre ce désormais fameux article 52. Dans son rapport établi au nom de la commission des finances, le député Nicolas Perruchot (NC) a notamment déploré que « le gouvernement n’ait pas informé plus en amont le Parlement de son intention ». L’exposé des motifs de cet article est sans ambiguïté. Il vise à modifier « le régime relatif aux transferts du patrimoine de l’État et de ses établissements publics (et non plus du seul Centre des monuments nationaux) au profit d’une méthode ouverte : celle d’un appel généralisé et sans limite temporelle au volontariat des collectivités locales ». Le gouvernement, inspiré par une proposition de loi présentée en octobre 2008 par le sénateur Philippe Richert (UMP), entend donc passer à la vitesse supérieure pour décentraliser les monuments historiques, en supprimant les garde-fous posés par la loi du 13 août 2004. La possibilité de demande de transfert, limitée dans le temps, concernait alors 176 monuments figurant sur une liste établie par une commission réunie autour de l’historien René Rémond. Celle-ci excluait notamment le transfert de lieux de mémoire nationale ou d’anciens biens de la Couronne. 65 sites ont ainsi été dévolus, 56 conventions étant d’ores et déjà signées. Des chiffres insuffisants pour la Cour des comptes, qui juge « ce bilan décevant » dans un rapport consacré à la décentralisation. Cela alors qu’aucun bilan économique et qualitatif n’a encore été établi.

Pour accélérer la cadence, le nouveau texte prévoit que tous les monuments historiques protégés appartenant à l’État – entiers ou par partie, mais aussi des « objets » – seront désormais susceptibles d’être transférés à une collectivité locale. Le Musée du Louvre ou l’Arc de triomphe, mais aussi la cathédrale de Chartres pourraient faire l’objet d’une demande. Et dans la mouture actuelle du texte, seul le préfet est habilité à donner son accord, le texte initial ne prévoyant aucune consultation des services du ministère de la Culture. Interpellé sur ce sujet, Frédéric Mitterrand a joué les bons soldats : « Oui à la dévolution voulue par le gouvernement, oui à l’activation locale lorsqu’elle peut donner à ces monuments et à ces lieux une vie nouvelle pour le bien de tous. » Des arguments qui n’ont guère convaincu les députés présents. Plusieurs amendements au texte ont été déposés par la commission des affaires culturelles, dont l’un de suppression pure et simple de la part de Marcel Rogemont (SRC). Ils devaient être discutés lors du vote du budget en séance, le 12 novembre. « Au détour de la loi de finances, on change radicalement les données », déplore Marcel Rogemont qui réclame l’ouverture d’un vrai débat sur cet article, mais aussi une étude d’impact pour le Centre des monuments nationaux (CMN). Car il ne fait nul doute que les seuls monuments qui intéresseront les collectivités, déjà étranglées par les transferts et la réforme de la taxe professionnelle, sont les plus rentables. Isabelle Lemesle, présidente du CMN, s’inquiète, elle, pour l’avenir de son institution : « Le système de péréquation entre les monuments sur lequel repose le CMN, qui s’autofinance à 85 %, risque d’être mis en péril par cette nouvelle vague de décentralisation. Car, sur les 96 monuments que nous gérons, 6 sont bénéficiaires en fonctionnement et nous permettent d’ouvrir les autres au public. » Les conséquences économiques de l’opération sont peu évidentes. La première vague de décentralisation avait eu un coût significatif pour l’État, qui a dû compenser par une subvention la perte de recettes pour le CMN, mais aussi financer, souvent à hauteur de 50 %, les travaux menés sur ces monuments décentralisés. Marcel Rogemont y voit aussi un autre risque, pour les élus cette fois-ci : « Face à un monument appartenant à l’État qui serait en situation de péril, la population risque d’exiger des collectivités qu’elles en demandent le transfert pour en assurer la sauvegarde puisqu’elles en auront désormais le droit. » Autant de questions dont Matignon a tenté de faire l’économie.

Source : Le Journal des Arts, n°313, 13/11/09

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Une convention Culture et Tourisme très attendue

Albi-illustrationFrédéric MITTERRAND, ministre de la Culture et de la Communication, et Hervé NOVELLI, secrétaire d’Etat chargé du Commerce, de l’Artisanat, des Petites et Moyennes Entreprises, du Tourisme, des Services et de la Consommation, ont donné le 6 novembre le coup d’envoi d’une nouvelle politique visant à développer le potentiel économique et touristique du patrimoine culturel français.

La culture de la France, par son histoire, son art de vivre, son patrimoine est une source d’attractivité exceptionnelle. En effet, grâce à ses musées, ses monuments, ses festivals, ses évènements culturels, le tourisme culturel tient une place particulière en France, tant dans l’activité économique que dans le rayonnement de notre pays. Ils drainent chaque année des millions de visiteurs français et étrangers. Face à un intérêt croissant de visiteurs venant du monde entier, Frédéric Mitterrand et Hervé Novelli ont voulu engager une action commune et concrète pour répondre à cette attente. Ainsi, ils ont signé, le 6 novembre, une convention cadre « culture-tourisme » qui fixe un objectif prioritaire : favoriser l’innovation et les pratiques de valorisation touristique portant sur le patrimoine monumental, en encourageant des opérations pouvant conduire dans le respect de la conservation de ce patrimoine à la création d’activités touristiques d’affaires, d’hébergement ou de création d’évènements dans les sites.

Le ministère de la culture et de la communication proposera une liste de sites placés sous sa responsabilité ou celle de ses établissements publics, dans lesquels l’expérimentation de la valorisation des lieux par l’installation d’une activité économique (restauration, hôtellerie, séminaires, etc.) lui apparaîtra envisageable au regard de leur qualité et de leur conservation patrimoniales. Il appartiendra à Atout France, l’agence de développement touristique de la France, d’engager avec les responsables des sites concernés, les contacts nécessaires à la mise en place de cette expérimentation.

Les autres objectifs consistent à :

  • œuvrer conjointement au développement de grands projets événementiels, en conjuguant leurs efforts pour favoriser le développement d’événements susceptibles de donner de l’ampleur aux politiques touristiques et culturelles des territoires.
  • élaborer un outil partagé pour la connaissance de la fréquentation touristique des sites et évènements culturels, en mobilisant leurs moyens financiers pour continuer le travail d’amélioration de la connaissance et de la diffusion des fréquentations touristiques des lieux culturels,
  • promouvoir le tourisme culturel auprès des clientèles françaises et internationales qui, pour ces dernières affirment à plus de 50% établir leur choix de séjours en France sur la découverte du patrimoine culturel,
  • développer la marque « Qualité-Tourisme », en valorisant cette démarche qualité participant à l’amélioration de l’accueil et la satisfaction des visiteurs, en la faisant connaître à tous les organismes et établissements publics en charge de lieux de visite culturelle dont le Ministère de la Culture et de la Communication a la tutelle,
  • promouvoir la politique « culture et handicap », en amplifiant leur collaboration afin de généraliser et de mettre en valeur la mise en accessibilité du patrimoine et de l’expression culturelle qui contribuent à l’attrait de l’offre touristique française,
  • renforcer le lien entre tourisme et cinéma, en mobilisant les énergies en liaison avec les collectivités territoriales afin de favoriser le tournage de grandes productions internationales en France,
  • valoriser les itinéraires culturels européens comme vecteur de tourisme responsable, en soutenant le développement en France des « Itinéraires culturels européens » comme exemples d’un véritable tourisme culturel durable et réservant des moyens financiers spécifiques à leur développement,
  • œuvrer conjointement au niveau européen et international, en s’appuyant sur la charte pour le tourisme culturel de l’Unesco et la convention pour la promotion et la protection de la diversité des expressions culturelles pour promouvoir un modèle de tourisme appuyé sur des valeurs humanistes partagées , avec une attention particulière aux projets qui seront développés dans le cadre de « l’union pour la méditerranée ».

La convention cadre « culture-tourisme » concrétise la collaboration entre les services du ministère de la Culture et de la Communication, et du secrétariat d’Etat chargé du Commerce, de l’Artisanat, des Petites et Moyennes Entreprises, du Tourisme, des Services et de la Consommation et donne le coup d’envoi d’une nouvelle et ambitieuse politique de tourisme culturel.

Le texte de la convention

Source : portail du ministère de l’Economie et de l’Emploi.

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L’interview que (ne) nous a (pas) accordée Frédéric Mitterrand

DidierRyknerDidier Rykner de La Tribune de l’Art nous fait l’amitié de nous autoriser à diffuser dans son intégralité une interview un peu particulière de Frédéric Mitterrand. Il s’agit d’une interview qui n’a pas encore eu lieu mais qui a le mérite de poser des questions qui témoignent des préoccupations et des menaces qui pèsent aujourd’hui et plus que jamais sur le patrimoine, au moment où le tout récent ministre de la culture tente de retrouver un peu de sérénité après une rentrée pour le moins agitée, rentrée qui n’aura servi ni la politique culturelle, ni le ministère.

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Nous avons salué en son temps la nomination de Frédéric Mitterrand (voir brève du 23/6/09). Momus aussi, dont on connaît la dent dure et l’absence de compromission. Nous sommes d’ailleurs en complet accord avec l’éditorial que l’association vient de consacrer à ce sujet.
 Le ministre travaille beaucoup, comme en témoigne l’emploi du temps que son service de presse nous envoie toutes les semaines. On l’a cependant fort peu entendu sur le patrimoine et les musées. Depuis sa nomination, nous avons à plusieurs reprises cherché à l’interviewer. Il fallait attendre. Attendre la rentrée puisqu’il devait prendre connaissance des dossiers. Attendre la présentation du budget puisqu’il devait savoir de quels moyens il disposerait.
 Le budget est venu, un budget plutôt sérieux et où le patrimoine est mieux pris en compte que d’habitude. Mais l’interview, elle, est repoussée à une date non précisée. Pas pour l’instant nous est-il répondu. Nous ne sommes d’ailleurs pas seuls dans ce cas, tout entretien demandé par les grands médias, dès lors qu’il ne s’agit pas de généralités ou de la loi Hadopi est également systématiquement refusé. Or, nous avons beaucoup de questions pour le ministre tant les problèmes sont nombreux et urgents. S’il ne veut pas, pour le moment, s’exprimer, nous pouvons toujours les lui poser. Nous sommes à sa disposition pour publier ses réponses, le jour où il acceptera de s’exprimer devant les 6000 visiteurs quotidiens de La Tribune de l’Art.

Vous avez créé une commission chargée de se prononcer sur la suppression de l’avis conforme des ABF dans les ZPPAUP (voir article). Quelle est votre opinion à ce sujet ? Partagez-vous l’opinion du sénateur Yves Dauge, et de beaucoup d’observateurs et de parlementaires, que des intérêts particuliers avaient prévalu (il citait le cas de la ZPPAUP de Provins) ?

Les éoliennes se multiplient de manière anarchique dans le pays, menaçant de nombreux paysages et monuments historiques, jusqu’au Mont-Saint-Michel. Quelle est votre position sur ce sujet et que comptez-vous faire ?

Grâce au plan de relance, on se rapprochera en 2010 du budget minimum nécessaire pour la restauration des monuments historiques (400 millions d’euros). Qu’allez-vous faire pour pérenniser ces ressources avec lesquelles on a joué au yoyo depuis quelques années ? Où en est-on de l’idée d’un loto consacré au patrimoine, ou d’une taxe sur les jeux existants ?

L’Etat, dans une course désespérée à l’argent, se sépare de nombreux bâtiments classés ou inscrits monuments historiques. L’un des cas les plus graves et les plus emblématiques est l’Hôtel de la Marine (voir article) pour lequel il est prévu un bail emphytéotique et dont on ne sait pas ce que deviendra le mobilier qu’il renferme. Quelle est votre position à ce sujet ?

Beaucoup d’églises de petites communes ne sont plus entretenues et certaines sont menacées de démolition (voir article). Que comptez-vous faire pour aider le patrimoine non protégé ?

L’argent n’est pas tout : si certains chantiers menés par les monuments historiques sont de belles réussites (citons récemment la cour vitrée de l’Ecole des Beaux-Arts à laquelle nous allons consacrer un article), d’autres sont très critiquées par les historiens de l’art : rénovation trop poussée (château des ducs de Bretagne à Nantes), restitutions hasardeuses (Versailles), voire pire (Quartier Henri IV à Fontainebleau – voir article) . Quelle est votre position à ce sujet ? Les contrôles sont-ils suffisants ? Le ministère de la Culture ne devrait-il pas engager un grand débat à ce sujet ?

Pour l’Hôtel Lambert, la justice a tranché une première fois. Pourquoi le ministère de la Culture s’acharne-t-il alors qu’on se trouve assez proche d’une solution de compromis (voir éditorial) ? Y-a-t-il une honte à discuter avec les historiens de l’art et à négocier avec les associations de protection du patrimoine ? Ne peut-on sortir de ce dossier par le haut ?

Le Palais de la Porte Dorée va être affublé l’année prochaine d’une construction de Tadashi Kawamata qui va dénaturer sa façade et cacher une partie des sculptures d’Alfred Janniot (voir brève du 4/10/09). Pourtant, ce monument est entièrement classé. A quoi sert une telle protection, et à quoi sert la Commission nationale des monuments historiques lorsqu’elle autorise ce type de vandalisme ? Quelle est votre opinion à ce sujet, sachant que les promoteurs de ce projet ont fait croire qu’il était temporaire, alors qu’il était en réalité pérenne ?

La Tribune de l’Art a dénoncé une action de vandalisme d’une mairie (à Wintzenheim) sur un monument inscrit (la chapelle Herzog) et a démontré que les règlements n’avaient pas été respectés (voir article). Pourquoi le ministère de la Culture (via la DRAC) ne prend-il aucune sanction et ne porte-t-il pas plainte dans un cas comme celui-ci (voir article) ? Y-a-t-il une impunité des élus lorsqu’il ne respectent pas le patrimoine ?

La législation de l’affichage publicitaire à proximité des monuments historiques n’est pas respecté dans de très nombreuses villes, dont Paris ? Les préfets ferment les yeux. Comptez-vous agir pour faire simplement respecter la loi dans ce domaine ?

Plus globalement, trouvez-vous normal que les défenseurs du patrimoine aient le sentiment que le plus grand adversaire du patrimoine est l’Etat et les collectivités locales ? Soit directement, soit par laisser-faire ?

La Direction des Musées de France et la Direction du Patrimoine vont être regroupées en une seule direction, suite à la réorganisation du ministère dont vous n’êtes pas à l’origine, mais que vous avez approuvée. Comment comptez-vous donner de véritables moyens d’action à cette nouvelle Direction ?

L’Agence France-Muséums, chargée du Louvre Abou-Dhabi et composée de conservateurs français sous la direction du président du Musée du Louvre, achète des œuvres pour un musée étranger, parfois contre l’intérêt des musées français (tentative d’achat d’un tableau de Géricault qui pouvait intéresser le musée de Lyon – voir brève du 3/4/09, achat d’une fibule wisigothique que le Louvre avait longtemps souhaité acheter – voir brève du 8/6/09…). Trouvez-vous cela normal ?

Le ministère de la Culture revendique un fragment du Jubé de la Cathédrale de Chartres appartenant à un antiquaire parisien (voir article). Cet objet avait disparu depuis la Révolution. Soit l’Etat perd et l’objet est définitivement perdu pour la France, soit l’Etat gagne, et l’on imagine les conséquences sur les pour les musées dont les collections se sont en partie constituées sur les confiscations révolutionnaires. Vous n’êtes pas responsable de cette action qui a été entamée avant votre arrivée. Quelle est votre position à ce sujet ? Ne serait-il pas plus prudent – et surtout plus juste – de retirer cette demande ?

Les musées de province ont un budget d’acquisition très réduit et les œuvres d’art importantes continuent à sortir de France. L’Etat ne pourrait-il pas être plus généreux envers ces musées de province ? Tous les chefs-d’œuvre doivent-ils finir dans les musées parisiens ?

Les procédures d’acquisition sont très longues et il n’est pas possible pour les musées d’acquérir rapidement une œuvre réapparue et passant aux enchères. Ne faudrait-il pas prévoir un fonds de roulement qui permettrait d’acheter rapidement pour les musées ?

La Tribune de l’Art a démontré, dans une longue enquête (voir article), que les dépôts des musées nationaux hors des musées, dans des bâtiments officiels, étaient illégaux et nombreux. Comment le ministère de la Culture peut-il accepter une telle situation. La loi n’est-elle valable que pour les particuliers ?

Propos (non) recueillis par Didier Rykner

© La Tribune de l’Art

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